Apprendre, c’est se construire
des images dans sa tête, mais encore
?
B.Grosgeorge

Basketball n°613

L’entraîneur par ce qu’il propose au niveau des consignes, démonstrations, corrections, ou encore avec l’utilisation de la vidéo (libre ou guidée), incite celui qui apprend à créer de nouvelles images ou les modifier. Celles-ci remplissent plusieurs fonctions :

1. aider l’apprentissage des techniques en :

- renforçant les bons comportements
- décelant des erreurs
- apportant de nouvelles connaissances
- augmentant la concentration et la rapidité de décision

2. augmenter la motivation

3. donner confiance dans la gestion du stress

La pratique proposée par l’entraîneur et les images mentales élaborées par le joueur

Les situations proposées par l’entraîneur ne doivent pas être systématiquement simplifiées, décomposées , car dans ce cas elles encouragent le joueur à produire des images formelles de la technique, déconnectées du jeu et vides de sens pour lui. Certes l’entraîneur agit de la sorte avec des intentions louables mais il faut savoir que la tâche fixée par l’entraîneur est toujours redéfinie par le joueur et que des décalages importants peuvent se faire jour. Il faut donner la priorité aux images qui suscitent des émotions et pour cela, il est nécessaire de ne pas décomposer à outrance les gestes techniques et d’aborder au départ la technique globalement.

Prenons un exemple: lorsqu’en qualité d’observateur, je vois des " plantés de pied " faits à plus de 8 mètres chez des jeunes dans le but de feinter un tir pour ensuite partir en dribble, je me demande alors ce qui a été intégré au niveau de l’apprentissage ? Même si dans le meilleur des cas cette feinte est amorcée dans la zone de tir du joueur, elles est rarement réalisée avec un transport du poids du corps ( sur le pied qui se plante en avant pour revenir ensuite su le pied de pivot au moment du départ en dribble. Réalisée ainsi cette action se trouve sanctionnée par un " marcher "

Les images mentales liées à cette action de jeu se sont uniquement référées à une forme extérieure sans associer ce qui devrait être ressenti par le joueur au niveau du transport de son poids de corps et il n’est pas étonnant ensuite que la finalité de la manoeuvre et ses contraintes réglementaires soient perdues de vue.

Apprendre, n’est pas quelque chose de mécanique, c’est remanier des relations (y compris celles avec l’adversaire), réévaluer des souvenirs et savoir valoriser certaines attitudes. Apprendre c’est ressentir , décider , s’est s’engager dans la prédiction de positions et de mouvements afin de réaliser les représentations liées à l’accomplissement du but que se fixe le joueur.

Les images construites par répétitions mentales

Si l’on veut tirer le meilleur apprentissage à partir des images issues de la pratique, il faut encourager celui qui apprend à faire des répétitions mentales. Dans de nombreux articles il est fait état de son rôle positif notamment sur la réussite aux lancers francs (Clark, 1960 ...). Afin d’obtenir de meilleurs résultats, il est conseillé de ne pas limiter les possibilités d’imagerie uniquement par des images externes (se voir en train de ....) comme si on était filmé mais surtout valoriser les images construites par le joueur autour de son ressenti donc dans une perspective interne (lorsque je fais ... je ressens ...).

Si cette dernière méthode est retenue (notamment au cours des stages ou l’entraîneur dispose de davantage de temps), il faut tenir compte de l’âge des pratiquants et de leur niveau (Haslam, 1990).

Pour les plus jeunes (12-16ans) comme chez les moins expérimentés, il est préférable de donner la priorité à :

- la capacité à visualiser les grandes lignes des aspects offensifs et défensifs
- la capacité à visualiser et ressentir la conduite à tenir dans la création ou la fermeture d’espaces libres
- la capacité à visualiser les points clés liés à l’apprentissage des habiletés techniques
- propres aux actions de porteur de balle (montée de balle, son contrôle, et aux actions de passes ou de tirs)
- et de non porteur (démarquages, replacements, écrans retards ...)

Chez des joueurs plus âgés (16-20 ans) comme chez les joueurs les plus expérimentés, l’accent portera au contraire sur les aspects liés à la motivation

- niveau d’éveil physiologique par rapport à la prochaine performance
- niveau d’activation ( intérêt, nervosité, indifférence ..)
- connotations positives liées à la réussite de certaines actions (créations d’espaces libres, passes décisives, marquage d’adversaires ...).
Toutes les

Quelle que soit l’origine des images mentales ( la pratique ou l’entraînement mental), elles se créent plus facilement dans un contexte émotionnel et doivent être reliées à un point de vue personnel (celui du joueur) ; c’est l’une des raisons pour lesquelles la reproduction des gestes techniques des joueurs de la NBA par les jeunes reste le plus souvent pratiquée de façon inopportune et inefficace.

Lorsque l’apprenti joueur est " manipulé " par conditionnement médiatique ou par un entraîneur il ne sait plus qu’il existe et il lui devient alors difficile d’associer ce qu’il ressent à la finalité de son action; il éprouve ensuite plus de difficultés à mémoriser ce qu’il apprend.

Pour le joueur qui est dans l’action (ou qui s’imagine l’être ), c’est l’émotion et son vécu qui sont prioritaires dans l’élaboration de ses images mentales. C’est pourquoi le contenu de la tactique doit s’enraciner dans la pratique et ne doit pas dépasser ce qui est potentiellement réalisable par le joueur. Pour les mêmes raisons, la lecture du jeu ne sort pas du chapeau de l’entraîneur, c’est un processus lent.