Page 4 de basketball n° 588

Les 12 critères des interventions
pédagogiques efficaces

B.Grosgeorge

Basketball n° 588

Dans un but de formation d'enseignants en éducation physique Brunelle dès 1979, a cité quelques uns des travaux les plus connus et proposé de s’appuyer sur ceux d'Anderson et Barette ainsi que ceux de Bennet et Rosenshine (1978) pour mettre au point une liste de 12 critères d'intervention dans le but d'inciter les élèves à réaliser efficacement des tâches proposées en éducation physique.

Nous allons reprendre un à un ces critères en insistant sur ce qui nous parait déterminant dans une perspective d'entraînement.

1. La capacité à définir de façon claire et concise les tâches à réaliser (ce qu'il y a à faire)

Les intervenants pourraient être beaucoup plus efficaces en faisant davantage usage de schémas, de tableaux, planches magnétiques, pour concrétiser leurs explications verbales.

Pour un niveau de pratique relativement débutant, cela ne suffit pas car en plus de la visualisation il faut que le joueur ait déjà vécu cela un peu avec son corps ; dans ce cas, les premières tentatives physiques doivent compléter l'explication.

2. La capacité à donner des consignes d'organisation claires et concises ( comment s’organiser)

Dans les schémas de jeu sur tableau, il est nécessaire de respecter les symboles conventionnels et de recourir à un langage précis et adapté tel qu'il est utilisé dans les ouvrages techniques. Le langage technique est censé jouer ce rôle, il doit être homogène et utiliser un nombre de mots limité.

Cela dit, lorsque nous passons sur le terrain, les choses ne sont pas aussi évidentes. L’enregistrement sur cassettes des consignes verbales (au cours d'entraînements) surprend tous les observateurs ; dans de nombreux cas, la consigne liée à la séquence pédagogique se révèle incompréhensible aux auditeurs. Dans certains cas des consignes contradictoires sont énoncées dans la même intervention de présentation de l'exercice (changement de situation de départ, de règle de décompte de points, de rotation de joueurs, de durée d'exercice ...).

D'autre part, toutes les informations utiles doivent être présentes ; par exemple si vous vous demandez de réaliser une séquence de jeu de pressing, il est capital de préciser simultanément :

- le système préconisé et la répartition des rôles des joueurs
- l'enjeu ( critère de victoire sur l'adversaire, ou durée de l'exercice)

Par exemple, le temps de pressing imposé par l'entraîneur doit être précisé d'emblée sinon, les joueurs risquent de s'économiser pour "tenir la distance" et de ne plus "jouer le jeu"

3. La capacité à offrir des mises en situation sollicitantes

Pour lancer correctement un exercice, il est nécessaire :

- qu'il soit réalisable par la plupart des joueurs
- de proposer des organisations connues ou faciles à réaliser
- de stimuler les participants avec des renforcements spécifiques et éviter de se limiter à des remarques de type "vas y " "encore"
- d'utiliser des situations compétitives pour obtenir un plein engagement physique des joueurs

4. La capacité de poser des questions appropriées c'est à dire celles qui ont un sens immédiat pour le joueur

Trop souvent, les entraîneurs (débutants) se noient dans une quantité d'informations de commentaires ou d'interrogations dirigées vers les joueurs. L'entraîneur n'est pas présent sur le terrain pour apporter la preuve aux joueurs qu'il a une bonne connaissance de la technique, ses conseils doivent avant tout :

- être en rapport avec l'exercice
- avec le problème rencontré
- se limiter à ce qui peut favoriser la recherche d'une solution

5. La capacité à réduire au minimum les temps de transition

Une gestion efficace du groupe passe par une réduction des temps de transition. Cette qualité est très représentative de la qualité de l'intervenant. Ceci s'apprend et est très influencé par les points 1 et 2.

6. La capacité de détecter les premières manifestations d'un comportement inapproprié et réduire rapidement les comportements inappropriés pour éviter une sorte d'extinction progressive de l'activité des joueurs. Mais il ne faut pas que l'entraîneur se précipite pour autant car souvent ces comportements ont pour but de capter l'attention afin de solliciter une intervention davantage personnalisée (dans ce cas, il faut éviter d'intervenir négativement).

7. Créer une ambiance de travail positif et poir cela :

- se méfier des tâches trop faciles ou trop difficiles ou encore trop en rupture avec les habitudes des joueurs. Etant des compétiteurs, ils apprécient peu (d'emblée en tout cas) les situations qui mettent trop en évidence leurs lacunes.

- réagir davantage à ce que les joueurs font bien y compris les actions positives des joueurs "déviants" qui trouvent des solutions personnelles au problème posé par l'entraîneur.

- insister sur les éléments attentionnels liés aux tâches à résoudre
- Il faut aussi encourager de temps à autres les joueurs à se livrer à une auto-activité (autonome) pour entretenir leur motivation interne.

8. Eviter de dénigrer un joueur en présence des autres

- encourager initialement autant l'effort que la réussite liée à la tâche
- limiter les interventions négatives en se cantonnant au comportement et non à la personne
- ne pas abuser des punitions et l'utiliser au deuxième degré (de façon symbolique).

La punition collective qui est assez souvent utilisée en basket-ball (suicides ou autre) consiste en fait à "jouer" avec l'entraîneur à "ne pas se faire punir" et contribue, avec le léger stress qu'elle procure (notamment en risquant d'occasionner une punition à ses partenaires), augmente la charge de l'exercice et permet ainsi de se rapprocher un peu de l'enjeu de la compétition.

9. Impliquer des joueurs blessés

- les utiliser comme passeurs
- avec les jeunes, leur faire remplir des grilles d'adresse
- ou encore leur faire réaliser des tâches partielles d'entraînement en auto-activité

10. Se donner les moyens d'évaluer ce qui est appris en relation avec ce qui est proposé par l'entraîneur

- très souvent le entraîneurs veulent faire passer des gestes techniques aux joueurs et il faut évaluer ce qui semble le mieux leur convenir :

- utilisent-ils les techniques en jeu qu'on leur enseigne à l'entraînement ?
- et sinon pourquoi ?
Ceci permet de corriger les objectifs et de s'adapter aux réactions des joueurs.

11. Savoir distribuer des feed-backs précis pour relancer l'activité

- à tout moment de la séance, l’entraîneur doit diversifier ses interventions et :
- s'adresser aussi bien à un participant qu'à l'ensemble des joueurs
- ne pas sous estimer la dimension "rythme de réalisation" (se sont le plus souvent à tort les aspects spatiaux qui sont exclusivement repris).
- valoriser l'utilisation simultanée des plusieurs canaux de communication

12. Ajuster le degré de difficulté des tâches aux aptitudes des joueurs

- il faut éviter de réagir trop fréquemment aux comportements des joueurs est préjudiciable.
Chez les joueurs débutants ; ils risquerait de s'installer un décalage entre la demande de l’entraîneur et leurs tentatives pratiques. La connaissance de ce qu'il y à faire doit être accompagnée simultanément des outils nécessaires pour faire ce qui est demandé.

Pour les joueurs très entraînés il faut savoir qu'ils ont déjà les images mentales pour réaliser ce qui est demandé et qu'en cas d’échec, ils savent souvent ce qui n'a pas été. Ils n'ont pas forcément envie que l'entraîneur "enfonce le clou" négativement. Etant plus conscients du problème rencontré il faut surtout entretenir leur motivation.

- Il faut aussi évier de réagir insuffisamment aux comportements des joueurs

Tous les critères que nous venons d'illustrer qui qualifient les experts sont quelquefois difficiles à manipuler. Ils doivent être utilisés de façon authentique en accord avec la personnalité de l'entraîneur car ce qui compte avant tout, ce n'est pas la dimension objective de ce qui est dit mais la portée communicative (verbaux, visuels et kinesthésiques). De plus, il y a tout une dimension théâtrale et communicative dans les comportements de l'entraîneur qui ne doit pas être négligée. Des consignes quelquefois dérisoires ou inattendues peuvent créer l'enthousiasme et avoir des effets positifs inespérés.