PRÉAMBULE On pense souvent que les spécialistes de préparation physique sont des adeptes d'une grande quantité de travail et des fanatiques de l'épuisement musculaire. En fait si quelque part des spécimens fossiles de cette conception existent sûrement encore, les choses ont sérieusement évolué ces dernières années. Aujourd'hui le préparateur physique est centré sur la qualité et l'efficacité de son travail, mieux même il s'interroge en permanence sur l'intérêt des efforts qu'il demande et cherche des formes de plus en plus efficaces qui présentent le meilleur rapport effort-résultat. Tous les efforts proposés sont évalués en posant la question fondamentale : " Qu'apporte la situation proposée ? " On effectue une véritable
comptabilité de la rentabilité des efforts. Dans cet esprit tout exercice
physique inutile est montré du doigt. Ceci étant évidemment encore plus
vrai quand il s'agit de jeunes en formation. QUESTIONS PRÉALABLES Ce qui frappe en premier lieu c'est la débauche d'énergie inutile
imposée aux jeunes joueurs. Ceci se traduit même dans le langage " on fait
du physique " au lieu de " on travaille les qualités physiques ", la
qualité est passée à la trappe, c'est vraiment l'impression que l'on a de
l'extérieur. La pratique du basket par ses exigences techniques et
tactiques impose un rythme de travail et une dépense d'énergie déjà très
importante, aussi quand on décide de faire " du physique ", il faut
vraiment que le jeu en vaille la chandelle. Il convient donc de se poser
les questions suivantes avant de commencer : En résumé: POUR LA MÊME DÉMARCHE SUR LE PHYSIQUE QUE SUR LE TECHNIQUE Pour bien faire comprendre notre logique, nous allons faire un rapprochement avec l'apprentissage technique. Pour obtenir des résultats corrects sur les fondamentaux techniques, il est important de se centrer au départ sur la qualité du geste. La qualité d'exécution est prioritaire sur la quantité. Il ne sert à rien de répéter de nombreuses fois un geste faux. Nous proposons la même démarche pour les qualités physiques : courir de nombreuses fois (ou longtemps) sur un placement défectueux ou avec des contractions musculaires de mauvaise qualité, sauter 100 fois n'importe comment, tout cela ne sert à rien. Il faut d'abord corriger le placement (par la musculation) et améliorer la qualité de la réponse musculaire que nécessite la vitesse (là encore par la musculation). Une fois ces bases maîtrisées, on peut alors se permettre de répéter les efforts et d'envisager les paramètres aérobies. Mais là encore, on veillera à ne pas oublier la qualité : course lente ou travail intermittent, nous n'hésitons pas, le modèle du 10-20 nous parait idéal (10 s de travail explosif - 20 secondes de récupération passive). En résumé: Fibres lentes ou fibres rapides, il faut choisir !!! Tout le monde tombe facilement d'accord sur les 2 paramètres importants de la préparation physique en basket : vitesse-détente et puissance maximale aérobie (PMA). On construit donc une programmation articulée sur ces 2 axes et, dans le meilleur des cas, on consacre un temps égal aux 2 aspects (souvent malheureusement on passe plus de temps sur la PMA). On croit alors être efficace sur le paramètre vitesse-détente, c'est là que l'on se trompe lourdement. La vitesse et la détente ne sont pas améliorées dans un tel contexte. Explication:
Dans le cas d'un joueur de basket, essayons de représenter non plus la journée normale mais la quantité d'entraînement hebdomadaire (figure 3). Que peux-t-on mettre dans la case de solliciation des fibres rapides ? 1 - certaines séquences "basket" de début de séance avec concentration
maximum et de courte durée Le reste du travail tire dans le sens du lent : - l'entraînement classique de basket : dès que la fatigue intervient
dans une séance on bascule de la vitesse vers l'aérobie et on "émousse" la
vitesse On retrouve un déséquilibre énorme en faveur du lent et on s'étonne après cela que les athlètes soient lents ! L'illusion de la conception aérobie
L'exemple du décathlonien : En décathlon, 8 épreuves sur 10 sont essentiellement explosives et 2 (le 1500 m et le 400m) font appel aux paramètres aérobies. Or le 1500 m constitue la dernière épreuve celle où se joue le titre. Il est donc venu à l'idée de certains athlètes de préparer spécifiquement cette épreuve pour augmenter leurs chances de victoire. Ils ont effectué du travail aérobie pour améliorer le 1500 m. Même si cette quantité d'endurance était nettement inférieure à ce que fait le basketteur le résultat a été spectaculaire : le décathlonien perdait des points et des performances dans les 8 autres épreuves. La vitesse et la détente ont subi une influence négative. Il est donc clair que la conception aérobie nuit à l'explosivité et la vitesse absolue du joueur s'en trouve diminuée. La conception vitesse-force
Arguments scientifiques sur l'influence d'entraînements de vitesse-force
En résumé: Que tirer du ½ fond? le principe de l'économie d'énergie Que tirer de l'entraînement du ½ fond? Spontanément, je répondrais "rien". En fait il y a bien une leçon à retenir mais pas celle que l'on croit. Les coureurs de ½ fond on compris depuis longtemps que la performance sur 1500 ou 5000 m dépend de l'énergie disponible au moment de la compétition. Ainsi ils font une fixation sur toute perte d'énergie superflue. L'énergie perdue avant ne sera plus disponible pendant l'épreuve. Donnons deux conséquences concrètes : la semaine qui précède une compétition est extrêmement légère en terme de quantité, l'athlète ne fait presque rien : 2 séances de "fractionné" (fraction de distance de compétition en petites quantités au rythme de compétition). Deuxième exemple, l'échauffement : toute énergie dépensée avant l'épreuve va manquer en fin de course et c'est là que se joue le résultat : l'échauffement est donc fait le matin avec un petit rappel l'après-midi avant l'épreuve, ce rappel consommant moins d'énergie. Appliqué au basket cela donnerait : Si on regarde le basket avec ces références on constate que l'on aurait beaucoup de choses à dire. Sur la semaine qui précède un match important par exemple, que pourrait-on mettre? En terme physique : un intermittent de 7 mn en début de semaine (10-20-5-25 par exemple), une séance de vitesse en fin de semaine et une séance de musculation (si la musculation fait partie des habitudes des joueurs) à raison de 3x3 répétitions en ½ squat à 90% (très lourd, ½ heure maximum). A cela s'ajoute évidemment le basket, si on ne prend en compte que le paramètre physique (être en forme le dimanche sans consommer l'énergie avant l'échéance) la dernière séance (souvent le vendredi) ne doit comporter que 4 à 5 séquences de jeu (de 3mn) au rythme du match (ou légèrement au dessus) de façon à se préparer aux exigences de la compétition sans accumuler de fatigue inutile. La deuxième séance de basket effectuée plus tôt dans la semaine pourra être plus conséquente, disons normale, mais avec toujours ce souci d'économie d'énergie (supprimer les efforts inutiles). On comprend que les exigences du basket imposent des efforts supplémentaires, dans ce cas l'entraîneur doit savoir qu'ils seront effectués au détriment de la forme physique du dimanche. L'entraîneur peut estimer que des situations tactiques justifient une fatigue plus grande dans la semaine et faire le pari que le manque de fraicheur physique sera compensé par une tactique plus efficace, mais il doit le faire en connaissance de cause. L'échauffement : Là aussi voilà quelque chose qui frappe le préparateur physique quand on regarde le basket : les échauffements sont trop quantitatifs, on dépense trop d'énergie et cette énergie va manquer en fin de match. Qu'on se prépare musculairement et qu'on évite les accidents voilà l'objectif, mais surtout qu'on s'économise. Le basket à tous les niveaux ne l'a pas compris. Éviter tout effort inutile (pas de bondissements), quelques sprints (en fréquence et en amplitude) et un échauffement musculaire analytique pratiqué depuis 30 ans en sprint et appelé "échauffement russe". Le suicide en apothéose Toujours avec le même regard extérieur au basket et avec le souci d'économie d'énergie qui vient d'être exposé comment qualifier cette invention exclusive au basket qu'est le "suicide" (le bien nommé)? Délire !!! Énormité !!! Les mots ne sont pas assez forts. Si on comprend les raisons qui ont présidé à sa création (punition, respect de l'entraîneur, esprit d'équipe…) et tous les aspects d'ordre psychologique, du point de vue physique il s'agit d'une horreur. Il représente en fait un concentré de tout le négatif de la mauvaise préparation physique : - effort gratuit (dépense d'énergie (et quelle dépense ! un vieux coup
de lactique!!!)) En clair ce ne sont pas les personnes qui l'utilisent qui sont en cause
mais toute la tradition du basket qui en a fait un élément à part entière
de l'entraînement. CONCLUSION L'individu, surtout quand il est jeune, mérite le respect aussi avant de lui imposer une dépense d'énergie, il faut s'interroger sur l'intérêt de l'effort. La philosophie " plus j'en bave (pour rester poli) mieux je me porte " est archaïque, il semble qu'elle ait encore cours en sport collectifs et le basket arrive en numéro 1. Personnellement, je tolère tous les efforts qui sont justifiés par des exigences " basket " (techniques ou tactiques) mais dès que l'objectif devient physique, je fais appel à mon bon sens et je suis vigilant sur l'intérêt de l'effort. L'entraîneur de basket doit être conscient que pour parvenir à ses objectifs " basket ", il est obligé de demander déjà beaucoup d'effort à ces joueurs et cela est normal, je suis le premier à l'admettre. Que peut-il se permettre en plus ? Peu de chose et donc du qualitatif. Il doit évaluer la charge de travail qu'il impose par le basket (l'entraînement spécifique) qui est essentiellement du registre aérobie, et compléter en priorité par un travail de vitesse et de détente dans lequel la musculation doit prendre place (mais attention avec grande intensité et donc grande compétence de l'entraîneur). Le travail de vitesse est le plus simple, mais attention, il ne s'agit pas que de se démener comme des fous, aujourd'hui on distingue trois types de séances en vitesse : - Le travail d'appuis et bondissement type " skipping " En puisant prioritairement dans ces registres, on peut faire des choses intéressantes sans matériel sophistiqué. Bibliographie : - Hickson, R. C., B. A. dvorak, E. M. Gorostiaga, T. T. Kurowski, and
C. Forster. Potential for strength and endurance training to amplify
endurance performance. . J. Appl. Physiol. 65 : 2285-2290, 1988.
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